Le troisième trimestre confirme la tendance à la baisse de la construction de logements en France, sensible depuis le début 2018: elle frappe maintenant immeubles comme maisons individuelles, et laisse attendre une année de repli.
Publiés lundi, les derniers chiffres en date du ministère de la Cohésion des Territoires témoignent d'un recul des permis de construire (-10,2%) comme des mises en chantier (-7,9%) entre juillet et septembre, par rapport à un an plus tôt. Les deux catégories avaient déjà décliné au premier semestre après une année 2017 certes florissante.
"Même si ça reste à un niveau élevé, c'est une tendance qui n'est clairement pas bonne", a prévenu à l'AFP Alexandra François-Cuxac, présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI). "C'est de nature à nous inquiéter."
Le déclin frappe les deux grandes catégories de logements, les immeubles et les maisons individuelles, malgré un redressement dans le cas particulier où elles sont comprises dans un projet immobilier plus large.
Dans le premier cas, alors que le logement collectif avait mieux résisté en début d'année que l'individuel, le déclin des permis de construire est particulièrement marqué au dernier trimestre: leur nombre recule de plus de 17%.
"On a une grande majorité de communes où les maires sont attentistes et n'accordent pas suffisamment de permis", a mis en avant Mme François-Cuxac, évoquant des raisons politiques, avec l'approche des municipales de 2020, comme économiques, au moment où le gouvernement est notamment en train de supprimer la taxe d'habitation sans définir clairement la compensation pour les communes.
Une autre raison est avancée par les acteurs du logement social, gros client de nouveaux immeubles: les économies demandées par le gouvernement, à hauteur de 1,5 milliard d'euros par an, n'encouragent pas les projets.
"Les mesures de réorganisation du secteur HLM (...) expliquent en bonne partie la baisse des ventes en bloc aux bailleurs sociaux", jugeait l'économiste Olivier Elluère, spécialiste de l'immobilier chez Crédit Agricole, dans une note publiée avant les chiffres de lundi.
Confronté à cette tendance depuis plusieurs mois, le gouvernement s'abstient de commenter les chiffres de la construction avant la fin de l'année, sur la même ligne que pour d'autres indicateurs comme le chômage.
- Fiscalité élevée -
Interrogé à la mi-octobre par l'AFP, le ministre du Logement, Julien Denormandie, reconnaissait toutefois que les réformes du gouvernement ont pu créer des "interrogations" et susciter des "décalages de projets".
L'exécutif insiste plutôt sur sa loi sur le logement, qui vient d'être adoptée par les parlementaires mais fait encore l'objet de recours au Conseil constitutionnel: elle vise à créer le contexte nécessaire pour construire plus de logements en simplifiant les règles.
"Mais l'effet sur la construction et la vente de logements de ce choc d'offre sera très graduel et mesuré à l'horizon 2018-2019", prévient M. Elluère.
De plus, parallèlement au déclin amorcé de la construction d'immeubles, l'économiste souligne que d'autres mesures du gouvernement contribuent à faire reculer le nombre de nouvelles maisons individuelles.
Sur ce terrain, c'est notamment l'annonce fin 2017 par le gouvernement de la réduction du périmètre géographique de plusieurs aides budgétaires et fiscales à la propriété, comme le prêt à taux zéro (PTZ), qui est en cause et particulièrement critiqué par le secteur du bâtiment.
"Le repli des ventes de neuf constaté dans les maisons individuelles en 2018 est en bonne partie dû à l'effet PTZ", juge M. Elluère, notant par ailleurs que la demande ne peut plus être soutenue par un déclin de taux de crédit déjà très bas.
De son côté, l'exécutif assure au contraire avoir donné plus de visibilité aux acquéreurs: s'il a recentré ces aides, il les a aussi prolongées pour plusieurs années.
"Ces soi-disant aides perturbent énormément le marché", a souligné lundi Nordine Hachemi, PDG du promoteur Kaufman & Broad, sur la radio BFM, jugeant qu'elles n'étaient là que pour compenser une fiscalité trop importante sur l'ensemble du logement.
"Le point numéro un, c'est comment revenir à une fiscalité raisonnable", a-t-il conclu. "Du coup, on n'aurait plus besoin de tous ces dispositifs qui changent en fonction des majorités politiques et déstabilisent le marché en permanence."
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Paris, 29 oct 2018 (AFP) - © 2018 AFP